30 septembre 2016

ONE NIGHT IN BANGKOK






Nuit d’août à Bangkok. Ciel menaçant, atmosphère lourde. La moiteur partout dans la rue, parfois contrée par un vent frais d’un établissement climatisé. Chaleur écrasante du métro mais voyage réfrigéré en rame occupée essentiellement par une population jeune. Les gratte-ciel rivalisent de hauteur, constructions fragiles d’apparence ou au contraire massives et impérialistes.

Le soir voit revenir les échoppes de produits divers, souvent bon marché. Le terrain est occupé par les contrefaçons, qui arrosent sans vergogne les étals.
Se frayer un passage dans cet univers expose à être interpellé par un rabatteur de bar à filles. Mais entre deux débits louches, un café diffuse de la musique européenne amplifiée. Beaucoup de marchands qui vivotent probablement, entre vendeurs de textiles à éléphants et restaurateurs de trottoir. Sans compter les chauffeurs de tuk tuk, qui proposent leur course ou somnolent affalés sur la banquette de leur véhicule aux couleurs affriolantes.


Inlassablement, une odeur fétide nous poursuit. Les égouts peut-être. La température élevée ajoutant à ce désagrément. La pollution automobile étant générée par les nombreux taxis fuchsia ou jaune/vert et des bus hors d’âge.


Au retour, l’air chargé nous pousse à prendre un rafraîchissement près d’un palace. Le bar 25° et ses décibels pop rock. Un cocktail  Sex on the beach  prépare la nuit qui en réalité sera réparatrice. Les derniers hectomètres vers le Swan Hotel sont difficiles. Chemin faisant, nous croisons des lampadaires d’un autre temps et toujours ce capharnaüm de câblages électriques sur des immeubles glauques. La voie devient déserte. Rue de Brest, tonnerre ! en français et en thaï, notre hôtel enfin. Il est tard. Pourtant, la nuit ressemble au jour ici. Un lieu de passage.



Bangkok 03 août 2016







29 septembre 2016

BLUME, FLEUR DE LA CUISINE REGIONALE




En marge du rallye Baiersbronn Classic, escale déjeunatoire et souvenir dans une vieille maison d'Obertal.

C'est une femme âgée qui nous accueille, la démarche mal assurée mais avec la voix ferme des gens de labeur. Erika, 78 ans, nous indique la table. Le restaurant commence à se vider, nous sommes un peu en retard.

Bientôt, un grand garçon nous rejoint. Theo HuB, plus jeune que son âge, la cinquième génération de la dynastie hôtelière et responsable de l'établissement. C'est lui qui dirige la cuisine aussi. Sa carte se nourrit des produits du terroir dont le parc national, avec un supplément d'herbes. Mais dans cette région touristique, le restaurateur a intérêt à offrir les incontournables, schnitzel, wurstsalat, truites...Pas question de rivaliser avec les tables de luxe, ici on savoure le traditionnel mais dans la qualité et le respect des mets et des saisons. Le Gasthof Blume est fréquenté essentiellement par une clientèle de proximité. Il est réputé entre autres pour la salade de pommes de terre.
Fondé en 1867, l'édifice est encore un hôtel de campagne de 18 chambres, qui n'a pas vocation à grandir, la famille HuB étant attachée au cachet de la structure, un havre de paix dans un environnement favorable à la détente.

                                                            La vie reprend 

Nous sommes là pour sonder les mémoires. En 1946, au lendemain de la guerre, sous occupation française, le Ruhestein fut le cadre d'une course de motos inédite. Les vainqueurs militaires s'étaient montrés magnanimes dans un contexte d'indigence et de carburant rare. Ils avaient autorisé cette épreuve sportive qui allait enflammer la route des crêtes. 30 à 40.000 spectateurs avaient assisté à cet événement sans lendemain. Toute la vallée voulait voir ces engins dans un joyeux vacarme et sans doute dans un nuage d'échappements...
Erika scrute ses souvenirs. Elle avait 8 ans à l'époque. Elle se souvient d'être montée à pied, comme tout le monde alors. De cette course mortelle aussi pour des pilotes. De ces engins d'un type nouveau qui annonçaient d'autres temps. Et de cette délicieuse marmelade au citron... Quand la vie reprend...

Erika a trimé toute sa vie manifestement. Elle a aussi eu la joie de rencontres marquantes, comme en 1954, année du triomphe des footballeurs allemands...
Son fils




Theo, 43 ans, n'a pas le temps de penser aux vieilles voitures. Mais le rallye Classic  générant des retombées pour l'ensemble de la vallée, il participe à l'effort collectif en soutenant les associations investies. Son regret: ne pas parler le français. Car dans ce coin d'Allemagne entre Strasbourg et Stuttgart, les Alsaciens sont nombreux.

28 septembre 2016

OTTO KLUMP, BOULANGER MALGRE LUI

A l'occasion de la Baiersbronn Classic qui s'est déroulée du 22 au 25 septembre, rencontre avec un entrepreneur à facettes multiples.

L'automobile ancienne passionne beaucoup de monde dans la région de Freudenstadt, dans le nord de la Forêt - Noire. A Baiersbronn, Otto Klump par exemple. Nous le trouvons chez lui, un dimanche matin à l'heure du petit déjeuner, affairé à ses pains. A 76 ans, il met toujours la main à la pâte dans l'entreprise qu'il a confiée à sa fille voilà dix ans et où officie encore son épouse, comme lui septuagénaire. Une boulangerie fondée en 1844, doublée d'un hôtel. Sauf qu'Otto n'a jamais aimé fabriquer le pain, m'a-t-il confié. Pourtant il a racheté dernièrement une autre maison boulangère. En négoce, il s'y entend manifestement, car il a pu se défaire lui de deux vieilles Citroën, "inadaptées au climat montagnard" de ce territoire.

                                     Rundblick - Express 

Voilà sa passion: les automobiles anciennes. Avant qu'il nous fasse apporter une Butterbretzel avec le café, Otto nous ouvre le hangar en contrebas de la rue d'en face. Y dorment plusieurs véhicules, dont l'imposant ancêtre du car. Un White de 1925. Acheté à l'état d'épave, le Yellowstone bus américain fut livré en caisse, mais son gabarit imposa qu'on l'amputât de son arrière. De fait, en le restaurant, Otto ne peut justifier des proportions réelles de son oldtimer
Le White peut emmener dix personnes sur les routes pittoresques du Murgtal. Il est loué avec chauffeur. Car la location de vieux volants est une autre activité d'Otto Klump. 

A ce jour, le collectionneur détient 8 véhicules d'époque. Son amour de la mécanique auto, il l'a forgé auprès d'un garagiste. Tout boulanger par filiation qu'il est, il estime naturel de savoir souder.







Quant à la retraite, à voir son allant, ce n'est pas pour demain. D'ailleurs, ses voitures sont âgées aussi, mais sûrement pas remisées.

L'une d'elles a perdu de l'huile sur le béton vierge du dépôt. L'employé qui en avait l'usage va avoir droit à une remontrance pour avoir négligé le nettoyage.
On ne badine pas avec la propreté en Allemagne.

27 septembre 2016

La blonde au side-squale

 

 

La moto au féminin ou la passion de Carmen pour les vieilles machines




Samedi 10 septembre 2016. Une belle journée d'été commence à Freudenstadt. Il est encore tôt ce week-end quand nous entrons dans une société automobile entre zone d'activités et pré. Un garage fondé en 1962 et fidèle à la marque Subaru depuis 35 ans. Pourtant, c'est de moto qu'il s'agit aujourd'hui, un autre pan de l'affaire familiale que nous visitons.

Notre hôte est Carmen Müller, une femme d'âge mûr aux longs cheveux blonds et au regard lumineux. C'est ici qu'elle fit son apprentissage, c'est ici qu'elle rencontra son mari Michael. Lui la cherchait à moto, mais c'est avec son papa qu'elle apprit le deux-roues. A la concession, tout le monde pratique le pilotage, à l'exception de grand-mère ("Oma besser nicht"). Et quand ils en ont le loisir, Carmen et Michael enfourchent leurs bécanes pour une virée de détente. Récemment, avec d'autres femmes, elle s'est offert un périple en Alsace sous la conduite d'un...pasteur motard.

Michael est revendeur de la mythique Royal Enfield, la moto d'Inde avec son cachet old style. "Ça se conduit comme un tracteur" glisse Michael, soulignant l'immuabilité des composants depuis des décennies. Sauf qu'il va falloir adapter le moteur aux normes antipollution.


Carmen nous raconte le rallye de Baiersbronn, sur les traces des pionniers de 1946. Cette année, elle fera le parcours à side-car, mais au guidon. Les rôles sont inversés, Michael s'installant dans la caisse. Vu son gabarit, le "Gespann" ne s'en tiendra que mieux sur la route, tant ce genre d'engin serait difficile à manœuvrer dans les  virages. Il peut arriver aussi que l'attelage se cabre. Le poids du passager est donc important et à vide, la caisse est lestée. Carmen partira en pole position au guidon d'une BMW 1951, après une courte formation de conduite. La caisse est reconnaissable entre toutes, avec ses dents de requin à la manière des chasseurs de la dernière guerre. Michael lui fait confiance. Après tout, ils sont conjoints,


donc unis pour le meilleur souvenir.

26 septembre 2016

BAIERSBRONN BAREISS

Hermann Bareiss le gentleman hôtelier

 

Dans la région de Freudenstadt, la famille Bareiss a été pionnière dans le tourisme. Rencontre avec Hermann, le dirigeant de l'affaire familiale devenue un employeur majeur à Baiersbronn.

 

Samedi, fin d'après-midi chaude  en ce mois de septembre. Après avoir mis le corps au repos dans l'espace wellness, nous avons un entretien avec le maître des lieux, Hermann Bareiss. Un homme grand, élégant et affable nous reçoit dans son bureau au rez-de-chaussée avec vue directe sur l'entrée de son établissement, bien que discret. Ce qui m'interpelle sans délai, c'est la bibliothèque. La culture et les affaires. Autour d'une coupe de champagne, Hermann Bareiss raconte les débuts de la saga de Mitteltal. 

Offrir un paradis 

Sa maman Hermine, veuve de guerre, ouvrit en 1951 un petit hôtel de six chambres doubles. Lui avait alors 7 ans. La maison offrait déjà l'eau chaude, fournie par le charbon. Un confort rare pour l'époque. C'étaient les premiers pas du tourisme à Baiersbronn. Sur inscription, le client pouvait prendre le bain à l'étage, où se trouvaient encore les toilettes. En 1953, c'était la première bonne saison. Dès lors, l'entreprise allait se développer et grandir pour atteindre aujourd'hui la centaine de chambres, le seuil optimal de l'avis des hôtes..."Werden Sie bitte nicht gröBer aber attraktiver". La famille Bareiss exploite un ensemble à multiples facettes, une hôtellerie de luxe, un espace bien être, plusieurs restaurants dont la table triplement étoilée sous les ordres de Claus-Peter Lumpp. A propos de  cuisine, dans cette grande commune où trois chefs se partagent huit macarons Michelin, Hermann rend hommage à ses pairs alsaciens, sans lesquels il ne serait peut-être pas à son niveau actuel. Il cite les frères Haeberlin, Yvonne, les Jung et Husser... Les Français lui ont donné recettes et fournisseurs.  De belles complicités professionnelles de part et d'autre du Rhin auront  consolidé des amitiés sincères et favorisé la quête de l'excellence culinaire dans cet écrin de la Forêt-Noire. Au Bareiss, le client doit se sentir comme à la maison. L'hôtel lui promet un paradis, comme on sait le trouver dans ce coin d'Allemagne prisé des Alsaciens, Strasbourg n'étant qu'à 70 km.

Un vieux cabriolet

Hermann Bareiss nous fait la conversation alors qu'il organise la Bareiss Classic, 12e édition d'un rallye vintage. Dans deux semaines, Baiersbronn vivra pleinement à l'heure de l'automobile ancienne, avec sa Classic, 4e de la série. En attendant, une trentaine d'oldtimer passent du bon temps dans la vallée de la Murg. Le propriétaire confie posséder une vieille Mercedes, mais comme tout entrepreneur, il a trop la tête dans le guidon pour s'adonner au

roadbook. 


Hotel Bareiss ***** Relais&Châteaux

www.bareiss.com 

 


 

 

 

19 septembre 2016

LA MOTO A L'ANCIENNE


 Rencontre avec Walther Möhrle, le motard de la Schwartzwaldhochstrasse

Du 22 au 25 septembre 2016 se disputera la Baiersbronn Classic, rallye de véhicules anciens créé sur les traces d'une ancienne course de motos, le Ruhesteinrennen de l'été 1946.
Dans l'immédiat après-guerre, on avait réussi à réunir une centaine de motos et side-cars plus quelques voitures pour une épreuve qui ne devait jamais être reconduite malgré un immense succès populaire. Il faut préciser que ce mois de juillet 46, plusieurs pilotes avaient perdu la vie.

Dans la fraîcheur vespérale de ce début septembre 2016, nous débarquons chez Walther Möhrle. A 65 ans, cet homme rugueux de prime abord a l’œil vif d'un Henry Fonda. Directeur d'école retraité, notre hôte se révélera rapidement attachant, décochant des pensées à l'emporte-pièce mais non sans humour. Dans son paradis des randonneurs, Walther est resté très actif dans le secours et l'entretien de la montagne. Naguère, il possédait des chevaux, dont il se sépara pour la paix de son ménage.
Mais il a gardé intacte une autre passion, la moto.

Walther qui pilote depuis son adolescence ne comprend pas l'inconscience des motards qui confondent la route haute avec un circuit. Il est de ceux qui ont permis la concrétisation du rallye de Baiersbronn en 2013. Lui-même dirige les opérations pour les deux-roues.

Après avoir partagé un verre de burgunder, sous le regard complice de son épouse, notre hôte s'empresse de chercher des documents et d'ouvrir son garage. Il nous montre ses belles machines, une Ducati et une Kawasaki.

Parce que "les possesseurs de bécanes jouent dans une autre division que les conducteurs d'automobiles anciennes", Walther s'est battu pour leur fixer un droit d'inscription symbolique au rallye. 19€46. Référence à la mythique année dans la région de Freudenstadt.